La COVID-19 a certes contribué à conscientiser la population à l’importance de l’hygiène et de la salubrité et je salue les efforts collectifs déployés pour remédier à la crise sanitaire mondiale. Cependant, la pandémie exacerbe malheureusement les comportements de gens sans scrupules qui tentent de faire du profit en misant sur la peur et la méconnaissance des gens. On remarque de plus en plus de publicités pour des produits « anti-COVID-19 » et une soudaine apparition de nouveaux services professionnels de nettoyage et de désinfection. Bien entendu, il est important de demeurer vigilants, à plus forte raison maintenant que certains organismes, tels que l’INRS et le Centre antifraude au Canada ou le CDC aux États-Unis, mettent la population en garde contre de nouvelles fraudes.
La tendance est à la fraude hygiénique
Qu’est-ce qu’une fraude hygiénique? C’est un terme inventé dans l’intérêt de cet article. Une fraude hygiénique c’est de proposer des outils, des produits ou des services qui ne répondent pas à la situation actuelle ou bien à votre situation en particulier, que ce soit volontaire ou non de la part du fournisseur de produits ou de services. Soit que la solution chimique est trop faible pour tuer le coronavirus donc absolument inefficace, soit que la solution est trop violente pour un virus aussi facile à inactiver, soit que la technique proposée favorise la contamination croisée. Dans tous les cas, il en résulte une dépense inutile de temps et d’argent, à vos dépens.
Devant autant de nouvelles informations, de variétés de produits et d’outils, prendre des décisions sans l’avis d’un expert peut vous coûter cher, mais peut surtout vous tromper en vous laissant croire que la surface est désinfectée et sécuritaire alors qu’elle ne l’est pas! Bref, faire appel aux services d’un consultant indépendant n’est pas une dépense superflue, bien au contraire, cela peut vous permettre de faire de grosses économies et surtout de faire le bon choix.
Exemple de fraudes hygiéniques
La plupart des entreprises agissent de façon professionnelle et dans votre intérêt. Elles ont intérêt à mettre en lumière certaines pratiques douteuses pour la protection du grand public. Voici des exemples de fraudes répandues repérées depuis les 10 derniers mois. Évidemment, nous avons pris le soin de ne pas identifier les victimes ni les entreprises en question :
- Un nouveau produit « partageant » le même DIN qu’un autre produit. Il s’agit d’une pratique illégale. Au Canada, tout produit homologué doit avoir son propre DIN (numéro d’identification de drogue).
- Promesses non tenues : promesse d’avoir un DIN, promesse de figurer sur la liste des désinfectants contre la COVID-19 de Santé Canada, promesse d’allégations virucides en voie d’obtention, etc.
- Exagérer les bienfaits réels du produit.
- Falsification de fiche de données de sécurité en copiant celle d’une autre fiche.
- Erreurs dans les bulletins techniques qui faussent la réalité et exposent les utilisateurs à des risques pour leur santé.
- Faire des allégations non permises au Canada sur les attributs des produits. Seule Santé Canada peut émettre les allégations relatives aux produits.
- Vendre des services et des techniques de désinfection inadaptées en privilégiant les techniques les plus longues pour facturer plus de temps.
- Ignorer les fiches de sécurité d’un produit jusqu’à aller à l’encontre en annonçant verbalement au client que l’utilisation du produit peut se faire sans équipement de protection individuelle alors que ce n’est pas ce qui est inscrit sur la fiche de donnée de sécurité.
- L’utilisation de logos de type « écologiques » sur les étiquettes et les publicités alors que le produit n’est même pas certifié écologique.
- Et surtout, délibérément passer sous silence le fait que le coronavirus ne se transmet pas autant qu’on le croyait par les objets et les surfaces et ne pas admettre que la désinfection à outrance est remise en question par beaucoup de spécialistes. Tous prônent plutôt une désinfection réfléchie et appropriée à chaque situation selon les risques inhérents.
En cette période critique, ayez recours à des spécialistes en hygiène et salubrité afin qu’ils constatent sur place les particularités de votre environnement, qu’ils scrutent vos appels d’offres, qu’ils évaluent vos choix en matière d’outils, de produits et de prestataires de services en entretien ménager. Leur intervention permet soit une validation ou une restructuration de vos protocoles de désinfection dans le but ultime de garantir la sécurité de vos installations.
À travers tous les mandats qui nous ont été confiés au courant des 12 derniers mois, j’ai personnellement analysé d’innombrables produits désinfectants, des revêtements antibactériens de toutes sortes, validé plusieurs protocoles et même eu la chance de manipuler divers appareils de pulvérisation électrostatique. J’en viens à une conclusion très inquiétante : la fraude hygiénique se répand. On tente parfois de voler du temps ou de l’argent en misant sur la peur. La vigilance s’impose.
Nathalie Thibault
Microbiologiste agréée et directrice de la formation
ValkarTech